Des projets rentables pour améliorer le quotidien et changer les mentalités
Un vendredi soir de novembre une quinzaine de personnes se sont déplacées jusqu'aux Canaux dans le 19e arrondissement de Paris pour échanger sur le thème « business et féminisme ».
Brillamment animé par Lucie Groussin du collectif L'ESS Inspirantes et talentueusement illustré en direct par Anna Lentzner, le débat s'est penché sur la présence des femmes dans l'économie sociale et solidaire (ESS).
Parmi les intervenantes de la rencontre, deux maîtresse de conférences, Amélie Notais et Julie Tixier, et deux entrepreneuses, Claudette Lovencin et Marion Choueib.
La recherche sur entrepreneuriat des femmes
C'est à la cité des 4 000 à la Courneuve (93) que Amélie Notais et Julie Tixier ont mené une recherche sur l'entrepreneuriat féminin, dans le cadre des formations à l'entrepreneuriat social dispensés par la HEC aux femmes de ce quartier populaire de la Seine-Sait-Denis.
« Les femmes portent des projets locaux pour améliorer leur quotidien de leur ville et y rester » témoignent les deux chercheuses. L'idée initiale part généralement de situations vécues par les femmes elles-mêmes et leur envie de trouver une solution à leurs problèmes.
Le moteur n'est pas développer un projet pour s'enrichir ou partir ailleurs, ce qui bizarrement représente une difficulté pour la levée de fonds. En effet la majorité des aides et subventions sont fléchés vers des projets avec une certaine échelle.
L'égalité pas toujours au rendez vous
« Les projets portés par les femmes sont très ciblés, très souvent vers les populations dites vulnérables, comme les enfants, les personnes âgées, et les femmes ». Par ailleurs « ce sont des initiatives très ancrées dans leur territoire, qui répondent à une problématique locale ». Cela est une difficulté pour obtenir des financements, à rajouter au fait que les femmes « d'une part demandent des montants inférieurs à ceux demandés par les hommes (effet d'auto-censure) et d'autre part leur projet ont deux fois moins de chance d'être retenus par rapport à ceux de leurs homologues masculin » affirment Amélie Notais et Julie Tixier.
Savoir ce que je vaux
Claudette Lovecin a créé Fempo – la culotte menstruelle qui remplace les protections hygiéniques. Originaire du Canada et arrivée en France pour faire des études, Claudette et son amie Fanny lancent un sondage sur internet sur les règles. 3 000 femmes répondent qu'elles vivent leur règles comme un véritable problème. Partant de ce constat les deux entrepreneuses démarrent la production d'une culotte menstruelle qui deviendra aujourd'hui Fempo.
Fempo veut faire « changer le game ». Pour les deux créatrices, l'objectif n'est pas simplement vendre une culotte et de se comparer aux autres entrepreneurs mais de savoir ce dont elles ont besoin et surtout savoir ce que vaut leur produit. Elles s'inscrivent dans une vrai démarche pour l'émancipation féminine en leur proposant un produit qui donne le pouvoir aux femmes. Le facteur différenciant vis-à-vis les autres fabricants est le fait qu'elles entretiennent une communauté avec laquelle elles échanges sur le sujet.
Inspirer les jeunes filles
Partant du constat que les mamans du 18e arrondissement ne font pas assez de sport malgré leur envie d'en faire, Marion Choueib créé Famosport. Des salles de sport dédiées aux femmes pour qu'elle puissent venir avec leurs enfants et ainsi encourager leurs filles à en pratiquer aussi. L'adhésion se fait en fonction des revenus de chacune, et surtout, la pratique en binôme est de mise, afin de créer du lien entre les participantes.
Le projet est implanté dans les quartiers prioritaires de la ville sur le 18e arrondissement de Paris et l'objectif est de le déployer sur les autres arrondissements et communes limitrophes de la capitale. Par ailleurs Marion développe des offres destinées aux entreprises, afin de pouvoir assurer son modèle économique.
Ne pas avoir honte de gagner de l'argent
Les projets portés par les femmes dans le champs de l'ESS visent certes répondre à une problématique sociale, il est tout aussi important que les entrepreneuses à l'origine de ses projets puissent en vivre. Rappelons que l'écart de salaire entre femmes et hommes est toujours de 18,5 % en 2019 (source : observatoire des inégalités, Insee).
Si le phénomène du femwashing pointe dans le secteur marchand, ce n'est certainement pas le cas dans les solutions développées dans le cadre de l'ESS où ce qui prime avant tout est l'envie de changement des conditions des femmes dans la société.
L'entrepreneuriat féminin doit être encouragé et valorisé.
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